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Un nouveau décret et des technologies de pointe pour renforcer la télémédecine

Un nouveau décret et des technologies de pointe pour renforcer la télémédecine

Tandis que la pression s’accentue sur les lits d’hôpitaux, un décret vient de valider la prise en charge des activités de télésurveillance. Une manière de soulager les services et d’entériner une tendance déjà bien installée.

Un "hôpital virtuel" à la maison

La France est désormais le premier pays européen à rembourser les activités de télésurveillance. Le 30 décembre dernier, le décret 2002-1767 élargit le panel des pathologies prises en charge. Jusqu’ici limité à 5 pathologies, le remboursement sera désormais possible pour toutes les maladies suivi en télésurveillance. Une seule limite : que cette activité à distance présente un intérêt supérieur à celui d’un suivi médical conventionnel. Cette ouverture répond à un besoin conjoncturel. Crise des vocations, capacités d’accueil limitées, coupes budgétaires... Il a fallu apporter des solutions à cette situation et « amener la technologie hospitalière à domicile, explique Frédéric Valentin, directeur général France, Italie et Espagne de la société Masimo, spécialisée dans les dispositifs médicaux de monitorage non- invasif et la Télésurveillance. Cela participe à une baisse des coûts et des effectifs mobilisés tout en apportant du confort au patient. » Toujours selon le directeur général, dans un service d’étage, proposant une surveillance légère, le patient est vu une fois toutes les 4 heures. A domicile, il disposera « d’une surveillance de qualité clinique en continu équivalente à celle utilisée à l’hôpital ». Selon Yann-Maël Le Douarin, adjoint au chef de bureau « Coopérations et contractualisations » à la DGOS (Direction Générale de l’Offre de Soins), « il n’était plus temps d’attendre. Les bénéfices de telles pratiques sont considérables. » Tout d’abord, en termes organisationnels, la télésurveillance optimise le parcours de soins du patient tout en permettant aux soignants de mieux se coordonner. « C’est grâce à ce genre de pratiques que nous pourrons augmenter la file active des patients suivis à l’hôpital. » Et puis, en termes de qualité de vie du patient, la prise en charge clinique est améliorée. Il devient plus autonome et donc acteur de ses soins et « la détection au plus tôt de signes de décompensation permet d’éviter dans de nombreux cas une hospitalisation et des complications graves ».

« Nous assistons depuis quelques années à une transition de l’hospitalisation de résidence, tel qu’on la connaît jusqu’à ce jour, vers une hospitalisation de flux » précise le Pr Antoine Tesnière, directeur de PariSanté Campus. L’hospitalisation de flux se base sur les plateaux techniques et interventionnels dans des logiques de plateformes. Le patient s’y rend pour une intervention ou un traitement et beaucoup de choses sont gérées en aval et en amont de sa venue. Il peut ainsi très bien optimiser son passage en milieu hospitalier et sortir de l’établissement en poursuivant sa prise en charge a l’extérieur de l’hôpital. Cette transition est facilité par les plateformes et outils numériques, et nécessite d’accompagner les métiers et les organisations a ces évolutions. » Pour cela, les outils sont indispensables. Le développement de l’IoT a fait évoluer considérablement les pratiques. A tel point qu’il est possible, selon Stéphane Bertolino, spécialiste de la télémédecine chez Masimo, de contribuer à mettre en place « un hôpital virtuel chez le patient. » La solution de Télésurveillance Masimo SafetyNet ® donne accès à divers usages. « Tout d’abord un portail clinique qui collecte et affiche les données et déclenche si besoin des messages d’alertes via mail ou SMS. Et aussi des programmes de soins dédiés à chaque filière. Chaque jour, un message est envoyé au patient pour évaluer son état, sa douleur, lui présenter une vidéo ou lui donner un conseil. » Et au niveau du suivi, l’offre de Masimo est large, SPO2 de qualité clinique équivalente à la technologie hospitalière, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, température, indice de perfusion du flux artériel... De nombreux paramètres sont scrutés. Depuis 1989, la société américaine développe en effet des outils de mesure. Référence mondiale pour l’oxymétrie de pouls en néonatalogie et en pédiatrie, elle s’est spécialisée dans le non invasif. Indolore, sans risque, sans effets secondaires et facile d’utilisation, ce mode est parfaitement adapté à la télémédecine. « Et les usages à développer sont très nombreux, insiste Frédéric Valentin. Tous les éléments sont accessibles sur un même tableau de bord, paramétrable à souhait, en fonction de l’utilisation et du profil du patient ». Toutes les données sont ensuite renvoyées sur le DPI pour assurer le suivi et la surveillance. C’est d’ailleurs une des recommandations de la HAS (Haute Autorité de Santé), comme le rappelle Pierre Simon, praticien hospitalier spécialisé en télémédecine : « le médecin qui réalise une téléconsultation doit, d'une part avoir accès aux données de santé du patient nécessaires à la réalisation d'un acte de qualité, d'autre part effectuer à la fin de l'acte un compte-rendu qu'il dépose dans le dossier médical du patient. »

Un projet médical d'établissement

Au Centre Hospitalier de St-Brieuc, les réflexions sur la télémédecine sont engagées de longue date. « Sur le territoire national, de manière générale, nous manquons de lits en néonatalogie », précise Jérôme Aboab, médecin au GHT d’Armor. Il réfléchit à la possibilité de lancer un projet d’expérimentation pour de la surveillance à domicile « des enfants stabilisés dont l’enjeu serait la prise de poids ». Dans cette démarche, « Masimo nous aide, notamment dans la formulation de nos besoins. Avec leur forte expérience, ils ont des exemples de parcours patients à nous présenter et cela est primordial tant, dans ce genre de projets, l’aspect organisationnel est précieux. » En effet les questions soulevées sont d’importance. Choix des patients éligibles, surveillance des alertes, rotations du personnel, rôle attribué à la HAD... Une stratégie doit être élaborée entre tous les acteurs, de la direction jusqu’aux PSAD (Prestataires de Soins à Domicile) en passant par les services en hôpital. « C’est un réel projet d’établissement, insiste Stéphane Bertolino. Une approche médico-économique est nécessaire pour cartographier en amont l’activité de l’établissement. Durée Moyenne de Séjour (DMS), coût, patientèle sont ainsi passés au crible. Le but ? Réduire les DMS et optimiser les ressources. » Une perspective prometteuse pour les établissements de santé qui ne devraient pas rester insensibles à ces arguments.

Marion BOIS