La biologie moléculaire, pilier de la médecine de demain ?

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François Cornu Président d’Eurofins Biomnis Crédit photo : Eurofins Biomnis

Les récentes innovations technologiques en médecine génomique permettent de détecter des variations génétiques médicalement informatives en moins de temps, et pour des coûts de plus en plus maîtrisés. Le séquençage génétique vient épauler les prescripteurs dans leur travail diagnostique et pronostique, ainsi que dans leurs décisions thérapeutiques. De fait, ces dernières sont toujours plus personnalisées et profitent à la fois au patient et à sa famille. Le séquençage est devenu un outil de prévention et d’optimisation du soin sur lequel comptent quotidiennement les centres de pointe mais aussi la recherche. Son accès reste cependant inégal, et de nombreux enjeux restent à relever.

 

L’étude de l’ADN est un champ très large qui se divise en plusieurs spécialités avec un spectre d’application diversifié et plus que fertile. La génomique somatique traite des modifications accidentelles de l’ADN au cours de la vie. La génomique constitutionnelle pré et postnatale, quant à elle, étudie l’ADN de la conception jusqu’au décès, avec un intérêt pour un large panel de pathologies (rénales, malformations prénatales, cardiaques, maladies rares, pharmacogénétique, etc). Au niveau national, les laboratoires des grands CHU sont équipés, mais se spécialisent souvent dans une pathologie ciblée. Deux plateformes de médecine génomique (plateformes SeqOIA à Paris et Auragen en RhôneAlpes, ndlr) ont également été mises en place avec le support de l’État. Leur but ? Drainer les besoins et demandes du territoire français dans son ensemble en matière de tests génétiques. Mais ces laboratoires n’ont pas forcément les ressources humaines ou techniques pour répondre à l’augmentation des demandes, en témoignent les délais de rendus souvent très longs. Les laboratoires privés comme Eurofins Biomnis se positionnent en complémentarité avec les structures hospitalo-universitaires, afin de participer à l’effort national pour rendre la médecine génomique accessible à tous.

 

Eurofins Biomnis, leader européen de biologie médicale spécialisée, compte plus de 800 salariés en France, et propose plus de 3 000 tests à son catalogue. Le laboratoire reçoit des prélèvements venus de France (DROM compris) et de l’international. Expert en génétique, son principal enjeu aujourd’hui est d’accompagner l’essor de la médecine de précision. Dans cette optique, il propose depuis 2016 le séquençage de l’exome, technique qui permet d’envisager une détection précoce de la pathologie et une personnalisation des traitements. Cela consiste en effet à séquencer les régions appelées exons, qui représentent 2 % du génome et codent l’expression des protéines. A partir d’une seule prise de sang, la quasi-totalité des exons des gènes d’un patient est séquencée. Dans le cas de la recherche de maladies génétiques rares, l’interprétation des résultats d’un séquençage de ce type permet de poser un diagnostic dans environ 30-40% des cas alors que ce taux n’est que de 10%-15% avec les approches conventionnelles.

 

“L’innovation est notre moteur et le séquençage de l’exome représente une véritable révolution pour détecter de façon précoce ou prévenir des maladies graves et donc d’adapter in fine la prise en charge des patients et de leur famille. Il y a dix ans de cela, on arrivait à séquencer les exons de trois patients, pour un gène, en une série de séquençage. Aujourd’hui, nous pouvons analyser l’exome (~20 000 gènes) de quatre-vingt-seize patients simultanément, en une série, et sans avoir atteint la pleine capacité de l’automate. C’est un bond de géant. Nous investissons tant au niveau organisationnel et humain que technique pour répondre aux demandes des prescripteurs et des patients. Notre objectif est de leur garantir le meilleur délai dans l’interprétation des résultats, avec les méthodes les plus pointues, dans les meilleures conditions économiques”, explique Laure Raymond, pharmacienne biologiste spécialisée en génétique et responsable du service de génétique du laboratoire Eurofins Biomnis.

 

DE NOUVEAUX PARCOURS À IMAGINER

 

Qui dit nouvel outil d’analyse, dit aussi nouvelles ressources à développer et nouveaux parcours de soin à imaginer. “Le séquençage de l’exome implique l’intervention de techniciens experts pour préparer les échantillons et les insérer dans l’automate qui va lire les séquences de l’exome. Pour faciliter l’interprétation des résultats par le biologiste et le clinicien, qui ne peuvent pas analyser à l’œil nu quarante millions de paires de bases, le séquençage est couplé à une analyse bio-informatique intuitive utilisant l’intelligence artificielle, permettant de classer les variants” indique Laure Raymond. Chaque compte-rendu détaillé est enfin validé par un biologiste expert, à l’issue d’un dialogue clinico-biologique avec le prescripteur. Comprendre l’origine d’une pathologie, c’est pouvoir mieux la prévenir, la surveiller, la guérir et l’endiguer. L’enjeu de la médecine génomique est ici, dans la prévention, le diagnostic précoce et la personnalisation du soin. Son utilisation se heurte cependant à la problématique de la prise en charge par l’Assurance Maladie de ces tests innovants.

 

“La technologie évolue très vite et permet de véritables avancées pour les patients. Notre rôle en tant qu’acteur de santé publique est de contribuer à la rendre accessible au plus grand nombre. Pour cela, nous pensons que les acteurs privés comme nous peuvent et doivent travailler en bonne intelligence avec les acteurs publics qui croulent aujourd’hui sous la demande. On note par exemple que de plus en plus d’oncologues nous sollicitent pour éditer de véritables cartes d’identité tumorale qui leur permettent d’adapter la thérapie pour chaque patient et ce de façon rapide. Aujourd’hui, la demande est exponentielle et pour pouvoir aller encore plus loin, nous plaidons pour une introduction de ces analyses génétiques à la nomenclature des actes de biologie médicale.” souligne François Cornu, président d’Eurofins Biomnis.

 

Du côté des laboratoires, techniquement, tout est là. Ce qui manque, pour Laure Raymond comme pour François Cornu, c’est une formation des biologistes et des prescripteurs à ces nouveaux parcours de soin, usages et protocoles. Un système à repenser pour faire face à la demande, qui n’a rien d’anecdotique. Auto-immunité, compréhension physiopathologique des « Covid long », prévention propice à la diminution de la chronicité des pathologies et désengorgement des cabinets et des établissements de santé, la génomique a sa pierre à apporter à l’édifice. “Nous pouvons lire et interpréter les variations qui se produisent sur l’ensemble d’un génome et regarder leurs rôles dans la régulation de l’expression, la sur-expression ou l’extinction de certains gènes. Nous n’en sommes qu’aux balbutiements, mais la génétique nous permet, et nous permettra, d’améliorer significativement la prise en charge médicale des patients”, conclut François Cornu.

 

ARTICLE SIH

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