Chaque année, en France, 8 millions d’images médicales sont réalisées aux urgences. 4 clichés sur 5 seront interprétés directement sur place par un urgentiste. Selon la littérature internationale, quand il n’y a pas de relecture par un radiologue, le taux d’erreur est de 1 à 5%. Dans un contexte contraint comme celui des urgences, l’IA peut apporter une assistance précieuse en imagerie médicale.
Réduire le risque d’erreur en imagerie des urgences de 75%
« Aux urgences de Maubeuge, nous avons assez peu de radiologues, regrette Romain Dewilde, chef de service adjoint. L’urgentiste a surtout besoin d’être conforté dans son diagnostic pour définir précisément sa stratégie d’imagerie ». Voilà pourquoi le service vient de se doter d’une nouvelle solution : Chest/MSK AI (powered by SmartUrgences) développée par Milvue et déployée par Arterys. Cet outil assiste les urgentistes en traumatologie et sur les pathologies thoraciques. Les images réalisées sont pseudonymisées puis chiffrées avant d’être envoyées sur le Cloud Arterys. Accessible depuis tous les postes du service, la solution est capable de reconnaître la nature des traumatismes et leur incidence. Si l’outil apporte une aide au diagnostic, le résultat n’est pourtant pas donné immédiatement. « C’est une fois seulement que l’urgentiste a fait sa lecture que notre résultat est donné, insiste Christian Rapin, responsable commercial Europe pour Arterys. Cela nous permet de nous challenger vis-à-vis de l’intelligence artificielle, ajoute Romain Dewilde. Et de rester toujours en éveil, malgré la pression et la fatigue. C’est très stimulant ».
Obtenue en une minute, l’interprétation est ensuite transmise dans le workflow des urgences. « Nous allons ensuite prioriser les examens, sur trois niveaux, explique Aïssa Khelifa, directeur général de Milvue, qui a développé cet algorithme de dépistage. En fonction du risque, l’examen apparaît dans le workflow des urgences selon un code couleur (rouge/orange/vert) ». Et les résultats sont fiables. Les examens interprétés comme négatifs le sont à 99% (VPN de 99%) et les positifs à 97%. « Et c’est ce dont ont besoin les urgentistes, précise Christian Rapin. Ils veulent avant tout éviter de passer à côté d’une pathologie ». « C’est surtout appréciable sur les articulations complexes, comme le bassin ou le poignet », ajoute Romain Dewilde.
Et le recours à l’IA va être grandement facilité. L’intégration au workflow des Urgences est déterminante pour l’adoption de cette nouvelle technologie. L’interface avec le dossier patient a été validée et sera prochainement opérationnelle. « Il n’y aura plus d’obstacle pour que l’IA devienne un réflexe dans le quotidien de nos médecins » observe Romain Dewilde
Une plateforme d’algorithmes à disposition
La solution déployée à Maubeuge fait partie d’un portefeuille d’algorithmes bien plus vaste. « Nous avons développé une “MarketPlace” qui regroupe 25 algorithmes (commerciaux et de recherche), détaille Stéphane Boyer, directeur Europe d’Arterys. Scanner pulmonaire, IRM du cœur, scanner pour les AVC, tumeurs en IRM… Le panel que nous couvrons est large et en perpétuelle expansion ». Pour sélectionner chaque algorithme, un comité scientifique se réunit.
« Les examens sont plus complexes et les patients plus exigeants, constate Romain Dewilde. Le temps de traitement de chaque dossier s’allonge considérablement. Le recours à l’intelligence artificielle est donc inévitable ». Et pour faciliter l’adhésion à l’outil, Arterys a misé sur l’ergonomie et l’esthétisme de l’interface. A Maubeuge en tout cas, on se dit satisfait. Moins de plaintes et moins de risques d’erreur, le service rendu au patient s’en voit amélioré dans un cas sur cinq, comme le confirment les premiers résultats de l’étude en-cours.
Marion BOIS