eHOP : le succès d’un entrepôt local de données de santé rennais

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Tandis qu’à l’échelle nationale, la plateforme des données de santé Health Data Hub se développe, des initiatives locales prennent leur essor. A Rennes, le projet eHOP a pris forme il y a près de 10 ans. L’entrepôt regroupe à présent 5 millions de patients, 130 millions de documents et 1,2 milliard de données structurées…. Un succès qui ne se dément pas et continue de faire de nouveaux adeptes parmi les CHU.

La clé de voûte de l’entrepôt : un outil d’interopérabilité fiable

A l’origine du projet : Marc Cuggia, professeur d’informatique médicale à l’Université de Rennes 1 (chef d’équipe en Données Massive en Santé, au sein du laboratoire INSERM UMR 1099) et praticien hospitalier au CHU de Rennes. Il explique : « La plus grande difficulté d’un tel projet, c’est l’alimentation de l’entrepôt avec des données venant d’applications très diverses. Nous sommes confrontés en France à une “balkanisation” des systèmes d’information qui est préjudiciable à ce niveau ». Laboratoire, pharmacie, imagerie, dossier patient,… Il s’agit donc d’harmoniser toutes ces données pour les faire converger. Une mission dont la société Enovacom a fait son cheval de bataille. « Nous opérons un double nettoyage, précise Frédéric Bourcier, directeur produits et Recherche et Développement chez Enovacom. Un nettoyage sémantique, pour faire en sorte que les données parlent bien la même langue et un nettoyage syntaxique, relatif au format des données ». « Nous positionnons notre EAI en amont de l’entrepôt afin d’homogénéiser les flux et de télécharger des données propres », ajoute Elsa Calmel, chef des produits Enovacom.

Le travail d’extraction peut alors commencer. Un travail combiné à celui des services de la DSI qui « ont créé les flux d’extraction, explique Christine Pichon, directrice des systèmes d’information du CHU de Rennes et du GHT de Haute Bretagne. On dépose ensuite les données sur un “quai” avant qu’elles soient normalisées par Enovacom ». Une collaboration qui permet d’obtenir des données propres, exploitables pour des projets variés.

L’intérêt de la massification locale des données

L’un des projets phares d’eHOP tourne autour de la pharmacovigilance. En combinant les données de l’Assurance Maladie à celles de l’entrepôt, il traque les interactions médicamenteuses, « y compris hors hôpital », insiste Frédéric Rimattei, directeur général adjoint du CHU. « L’intérêt avec un tel volume, c’est qu’il devient possible de requêter un grand nombre d’épisodes, et de repérer des interactions entre 3 voire 4 molécules ».

Avec 130 millions de documents, de tels recoupements deviennent en effet possibles. Le volume « permet de compenser le manque de qualité, précise Christine Pichon. Car la donnée n’est jamais parfaite. Le volume permet de trouver des corrélations, malgré des données incomplètes. C’est le principe même du Big Data ».  Plus on a de données, plus les algorithmes apprennent vite. « Il faut beaucoup de données pour avoir des raisonnements cohérents. Et c’est primordial dans un pays comme la France où les données sont disparates et éclatées sur le territoire », insiste Frédéric Bourcier. Voilà pourquoi eHOP fonctionne désormais en réseau et regroupe une douzaine d’établissements.

La boucle vertueuse des données

Initialement très tournés vers la recherche, les programmes liés à eHOP s’orientent de plus en plus vers la médecine de routine. « Je ne crois pas du tout au côté “magique” des données, fait remarquer Marc Cuggia. Les entrepôts sont une brique technique mais c’est l’expertise de terrain qui doit primer ». Tôt ou tard, les bénéfices des innovations lancées par la recherche doivent se retrouver du côté des soins dans une « boucle vertueuse : les données issues du soin alimentent les algorithmes d’aide à la décision qui se trouveront peu à peu des applications dans des outils dédiés aux cliniciens ».

Même vision du côté de la direction générale du CHU de Rennes. Si Frédéric Rimattei regrette qu’il y ait encore peu d’exemples de l’utilisation des entrepôts de données de santé en routine clinique, il se projette. «  Dans la médecine de demain, il sera possible de confronter votre profil à celui de millions de profils comparables (en termes de pathologie, d’antécédents…) et ainsi d’ajuster votre prise en charge. C’est de la science-fiction aujourd’hui mais ça ne le sera pas demain car les entrepôts seront rentrés en phase d’exploitation en routine ». C’est ainsi « que l’on amènera de la preuve aux soignants, souligne Frédéric Bourcier. Ils ont besoin de constater que cela est efficace pour leurs patients. On aura alors tout gagné : la pertinence et l’adhésion pleine et entière des équipes soignantes ».

Marion BOIS

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